Il n’y a pas de lecture innocente du Discours de la servitude volontaire!

Le Discours s’inscrit dans la tradition rhétorique, celle des grands genres oratoires de l’Antiquité qui relèvent du judiciaire, de l’épidictique et du délibératif. Ce texte révolutionnaire et ambitieux entremêle propositions et digressions sur les origines de la servitude volontaire afin de chercher à comprendre les raisons d’un tel paradoxe.

L’exorde

L’auteur capte l’attention des lecteurs en ouvrant son discours par la citation de deux vers de l’Odyssée du poète Homère . Il souligne ainsi que la servitude est toujours un mal et annonce le propos de son oeuvre et le paradoxe qu’il soulève: pourquoi les êtres humains sont-ils si nombreux à accepter la tyrannie ?

  • L’auteur choisit de ne pas aborder la question des différents régimes politiques.
  • Ce qui l’intéresse avant tout est de comprendre comment il est possible que « tant d’hommes, tant de bourgs, tant de villes, tant de nations endurent quelquefois un tyran seul, qui n’a puissance que celle qu’ils lui donnent ».
  • Il souligne son indignation et son incompréhension devant le phénomène de la servitude qui fait perdre aux êtres humains toute dignité.

La narration

L’auteur écarte deux hypothèses:

  • les hommes accepteraient de se soumettre à un tyran parce qu’ils l’estiment.
  • les hommes s’asservissent par crainte de ce tyran.

L’auteur brosse alors un tableau saisissant de la servitude et affirme que les êtres humains acceptent d’eux-mêmes d’être réduits en esclavage. La servitude est donc présentée comme un état pitoyable, très difficile d’expliquer rationnellement: si les hommes voulaient vraiment être libres, ils le seraient.

Narration du discours par Magali VAN KELST

Le développement

Il convient donc de chercher comment cet asservissement volontaire a pu ainsi s’enraciner en l’homme, alors même que la servitude va à l’encontre des lois de la nature.

Premier argument: les être humains laissent leur nature originelle, qui est d’être libres, se corrompre avec le temps. Cet asservissement volontaire s’explique par l’influence de la coutume et par l’habitude qui dénaturent l’homme. A force de vivre asservis, ils oublient leur désir de liberté et s’accoutument à la servitude.

Deuxième argument: le tyran excelle à endormir la vaillance des hommes, en leur proposant des divertissements et des plaisirs faciles. Le peuple se laisse ainsi manipuler.

Dernier argument (ressort essentiel de la tyrannie): la domination du tyran s’appuie sur une subtile hiérarchisation des conseillers et des courtisans, oeuvrant par intérêt, qui sont ainsi asservis les uns aux autres. Dans cette pyramide hiérarchique, chacun tient l’autre sous le joug de sa domination. Il s’agit d’une véritable chaine de servitude.

La péroraison

La tyrannie est contraire à Dieu, et l’être humain doit se former pour s’élever moralement. C’est en « apprenant à bien faire » qu’il échappera au piège insidieux de la servitude volontaire.